Le solaire thermique, un potentiel largement sous exploité en France

Le solaire thermique, un potentiel largement sous exploitée en FranceMalgré des objectifs ambitieux et une croissance d’un facteur 14 attendue entre 2008 et 2020, le solaire thermique souffre de difficultés majeures sur le marché français : un manque d’un soutien cohérent à la filière, une communication insuffisante et un déficit d’expérience et de formation.

Jusqu’en 2006, le solaire thermique a pourtant bénéficié d’une politique favorable pour se développer fortement et représenter près de 200 000m² de panneaux installés chaque année.

Alcimed, société de conseil en innovation et développement de nouveaux marchés, revient sur les enjeux et les freins à lever pour le développement du marché du solaire thermique** en France.

Une filière laissée pour compte par les pouvoirs publics en France

L’absence d’un plan de soutien national et la priorité donnée à d’autres énergies renouvelables ont abouti à un marché limitéà 300 000m²/an, en stagnation depuis 5 ans. En effet, contrairement à nos voisins européens, Allemagne et Autriche en tête, le solaire thermique est le parent pauvre des énergies renouvelables en France. Elle représente ainsi 1,1% des ENR en Allemagne contre 0,3% en France, différence qui tend à s’accentuer malgré un ensoleillement de 20% supérieur en France.

Un soutien de l’Etat en pointilléà la filière avec la RT 2012 et le Fonds Chaleur

Deux cas particuliers illustrent les difficultés et incohérences associées au soutien des pouvoirs publics à la filière : la réglementation thermique 2012 (RT 2012) et le Fonds Chaleur.

L’objectif initial de la RT 2012 était de promouvoir l’innovation et certaines énergies, en particulier le solaire thermique. Finalement, le texte définitif autorise des alternatives telles que les chauffe-eau solaires thermodynamiques, moins performants, moins chers à l’installation et plus faciles à vendre pour les professionnels. Contrairement à l’effet initialement recherché, la RT 2012 privilégie des technologies anciennes et/ou moins performantes, au détriment du solaire thermique.

Le mode de calcul actuel du Fonds Chaleur, prenant en compte uniquement les coûts d’investissements et non de fonctionnement, favorise largement la biomasse au détriment du solaire thermique. Cela est donc particulièrement inadaptéà cette technologie, dont la source d’énergie, le soleil, est gratuite.

Une méconnaissance de cette énergie renouvelable

Une façon d’œuvrer à l’essor du solaire thermique est la communication sur cette énergie, aussi bien auprès du grand public que des professionnels. Aujourd’hui, il existe une profonde méconnaissance des potentialités de la technologie couplée à un amalgame avec le photovoltaïque, qui permet la production d’électricité et non de chaleur. Une part importante des clients et des utilisateurs potentiels associent ainsi solaire et électricité, les modifications de tarif de rachat de l’électricité et les difficultés que rencontrent la filière photovoltaïque limitent d’autant les investissements dans le solaire thermique.

Un coût élevé en raison d’un déficit de formation et de structuration

Le prix initial des systèmes solaires thermiques, près de 6.000 euros pour un chauffe-eau solaire individuel, est jugé excessif par rapport à d’autres énergies (biomasse, chauffe-eau thermodynamique notamment) et comparéà d’autres pays européens. En effet, la France n’a pas développé cette énergie d’un point de vue économique et n’a pas structuré sa chaîne de valeur en conséquence.

Cela a entrainé un manque de professionnalisation de l’offre de la part des acteurs français, en particulier dans l’installation et l’exploitation/maintenance. A titre d’exemple, l’installation d’un système solaire thermique nécessite des compétences de plombier-chauffagiste et de couvreur, les panneaux devant être posés sur le toit. Cette double compétence est très peu développée en France, le déficit de formation et d’expérience des installateurs français engendre ainsi des temps de pose plus longs et des primes de risque sur des chantiers peu courantes pour les sociétés généralistes.

Deux pays sortent leur épingle du jeu : l’Allemagne et l’Autriche

Dans ce contexte, et malgré un ensoleillement moins favorable que la France, l’Allemagne et l’Autriche ont mis l’accent très tôt sur le solaire thermique et ont structuré une filière industrielle forte au niveau national. Cette volonté industrielle et politique a permis de créer des marchés de taille critique suffisante pour pérenniser l’ensemble des acteurs de la filière et leur permettre de devenir des leaders européens et mondiaux, à l’image de Vaillant, Viessmann ou GreenOneTech.

De plus, grâce au volume important d’installations à réaliser et à des initiatives de l’ensemble des acteurs de la filière, l’Allemagne et l’Autriche disposent d’installateurs formés et expérimentés, capables de réaliser rapidement des installations de bonne qualité. Cet écosystème favorable permet aujourd’hui de réduire de 30% par rapport à la France, le coût final d’un système solaire thermique pour les utilisateurs, principalement grâce à un coût d’installation beaucoup plus faible.

Des actions à mettre en place pour développer une filière forte

Du point de vue d’Alcimed, hormis pour le stockage de la chaleur, le solaire thermique ne constitue pas un enjeu technologique fort mais représente une véritable opportunitééconomique et industrielle pour la France. Son essor est à privilégier mais plusieurs freins doivent être levés :

- une meilleure intégration des solutions solaires thermiques,

- une montée en compétence des installateurs,

- une place plus importante dans le bouquet énergétique français et enfin,

- une prise en main de la communication par les pouvoirs publics.

La simplification et la meilleure intégration des solutions solaires thermiques est l’une des voies privilégiées par les industriels pour développer le solaire thermique. La France dispose de nombreux acteurs généralistes dans le secteur du chauffage, mais peu de sociétés spécialisées dans le solaire thermique. Ainsi, des systèmes performants mais plus simples à installer rendraient cette énergie plus compétitive vis-à-vis du chauffe-eau solaire thermodynamique par exemple.

Face à ces difficultés, le développement des compétences dans la conception et l’installation de solutions solaires thermiques est un autre levier majeur pour créer une taille critique de marché suffisante afin de structurer une filière française. Dans ce cadre, le développement des fabricants et distributeurs spécialisés, capables de former et de conseiller les installateurs et utilisateurs des systèmes solaires thermiques, et de participer ainsi à la diffusion des solutions, est indispensable à l’essor de la filière.

Enfin, il est nécessaire de revoir la place du solaire thermique au sein du bouquet énergétique français et de lui donner une visibilité plus importante à l’image de celle qu’il occupe en Autriche et en Allemagne. Les pouvoirs publics ont un rôle crucial à jouer. Au-delà des incitations existantes et d’une simplification nécessaire des réglementations, l’Etat doit rapidement prendre le relais des industriels en engageant des actions de communications indispensables à l’éducation de la population au solaire thermique. Les acteurs de la filière, aujourd’hui concentrés sur le maintien de leur activité, n’en ont plus les moyens.


** Le solaire thermique comprend des technologies permettant de produire de l’eau chaude sanitaire, du chauffage, du froid et de la vapeur, pour des usages résidentiels ou industriels.

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